Cervetto : La difficile question des temps

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Chez l'individu biologique qu'est l'homme, le temps est fixé par l'expérience des générations : enfance, adolescence, jeunesse, âge mûr, vieillesse se succèdent et rythment le temps. Certes, des événements tragiques, d'ordre individuel ou collectif, peuvent entrer en ligne de compte, des modifications économico-sociales peuvent allonger le temps de vie moyen (comme cela s'est produit ce dernier siècle), mais en tout état de cause, le sens du temps biologique est une donnée stable. Le temps politique, lui, est un temps historique assujetti à la dialectique des accélérations et des décélérations. «Il y a des jours qui équivalent à deux décennies - nous rappelle Cervetto en citant Marx - et pourtant, dans le mouvement de la matière, un jour est un jour. » La césure stratégique de 1989, en sanctionnant la fin des régimes est-européens de capitalisme d'État qu'on a fait passer pour du socialisme, en a une fois de plus apporté une confirmation éclatante. Temps biologique et temps historique se fondent dans le creuset de la psychologie des hommes, qui sont protagonistes des luttes de classe. C'est un terrain difficile, car soumis à l'inévitable enchevêtrement de la rationalité et des sentiments. Un révolutionnaire, un marxiste, anticipe les rythmes des transformations sociales avec son coeur. Il n'y a donc pas à s'étonner que le mouvement de classe, par la voix y compris de ses meilleurs représentants, ait plus d'une fois imaginé des rythmes plus rapides que ceux qui se sont avérés.</br>
Seule la science peut permettre de s'émanciper de l'emprise du temps présent, qui presque toujours induit en erreur sur la réalité d'aujourd'hui - perçue comme absolue, indépendante de toute évolution - et qui en cela prépare les désillusions de demain. Cette émancipation, cette liberté, ne poursuit pas des buts prévisionnels abstraits, mais des objectifs pratiques. « La stratégie révolutionnaire s'appuie sur l'analyse des temps non pour dessiner l'avenir, tâche dont un mouvement réel objectif ne ressent point le besoin, mais pour fixer des échéances temporelles qui puissent servir de référence pour définir les tâches immédiates du présent, les tâches de la tactique. [...] </br>La tactique se trouve confrontée à des situations contingentes qui, pour reprendre la définition de Lénine, sont une combinaison multiforme de processus historiques à long terme. » Plus solide est la stratégie, plus souple peut être la tactique. La «question des temps» s'inscrit par là dans la pratique, dans la lutte quotidienne: « la science c'est la liberté ; car elle n'est pas une théorie coupée de la pratique, mais la pratique guidée par la théorie. »</p>

153 pages

Edition : 1997