Renaud Jean, la voix rouge des paysans

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article tiré du site "Les cahiers d'histoire, revue d'histoire critique" On savait que Renaud Jean avait toujours marqué des désaccords avec telle ou telle ligne du Parti ou de l’Internationale. Mais nous voyons mieux, avec ce livre, comment se fabrique, au fond, une certaine forme de dissension tolérable au sein du mouvement communiste, fût-ce aux pires moments du stalinisme. L’épisode de 1940 en est le meilleur révélateur. Renaud Jean manifeste par des lettres, pendant le procès des députés communistes, son sentiment que l’IC et le PCF doivent maintenir une ligne d’opposition résolue à l’Allemagne nazie, malgré le pacte germano-soviétique. Cette position est loin de celle que préconise alors Moscou. Cependant comme ces critiques ne sont pas publiques et que Renaud Jean ne s’associe pas aux députés qui renient le parti, il n’est pas exclu – malgré une note de Maurice Thorez de 1943 – même si une marginalisation va s’opérer. 4Un autre épisode significatif est celui des responsabilités prises par Renaud Jean au sein de la FDSEA du Lot-et-Garonne après la Seconde Guerre mondiale. Renaud Jean y acquiert une force et un rayonnement tels que le Parti ne peut remettre en cause, fût-elle contraire à sa ligne, l’action du leader paysan. Ainsi, en 1956, la FDSEA peut-elle appeler à des barrages lors d’une lutte paysanne alors que le Parti y est opposé au plan national. On voit alors un jeu subtil s’opérer : Renaud Jean gagne en indépendance ; le Parti continue à bénéficier de sa popularité locale tout en effaçant nationalement le tribun paysan. 5Sans doute y a-t-il là, au travers d’une personnalité forte et originale, les traces d’une histoire collective : celle de la fidélité communiste. Moins qu’une fidélité religieuse – même si certains traits d’une foi communiste apparaissent – c’est l’existence de marges sans cesse retravaillées qui assurent la durée de l’adhésion. Au prix peut-être, comme le notent les auteurs de la conclusion, d’une volonté de ne pas voir les aspects les plus noirs du stalinisme. édition : octobre 2012