Engels, le gentleman révolutionnaire

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28,00 €

Dr. Jekyll et Mr. Hyde : parcours d’un industriel révolutionnaire

Le premier pari de Hunt, celui de donner chair au personnage d’Engels, est réussi. La biographie se lit comme un roman, faisant entendre le brouhaha des brasseries berlinoises des années 1840 ; respirer l’odeur de la poudre sur les barricades de 1848 ; voir les misères de la classe ouvrière dans Manchester métamorphosé par la révolution industrielle. D’une façon générale, chaque chapitre est ouvert par une mise en contexte qui permet de mieux saisir les activités polymorphes d’Engels, de sa formation jeune-hégélienne des années 1840 à son action lors du soulèvement libéral de 1848 en Allemagne, de sa rencontre avec le prolétariat manchesterien en 1842 à sa carrière de manufacturier dans la même ville entre 1850 et 1869, des premières collaborations avec Marx en 1844 à la défense de son héritage intellectuel de 1883 à 1895. Malgré tout, le souci de faire un sort au moindre aspect de la vie du sujet conduit l’auteur à brouiller la hiérarchie des faits. La relation entre Engels et Mary Burns, ouvrière irlandaise rencontrée à Manchester, a son importance jusque dans les prodromes de la théorie marxiste car c’est elle qui lui révèle la face la plus noire du capitalisme. De ces expériences directes est issu The Condition of the Working-Class in England (1845), qui donne une première expression à certaines formules comme la distinction de classes ou la mission révolutionnaire du prolétariat. En revanche, l’aventure supposée d’Engels avec l’épouse de Moses Hess, communiste allemand réfugié à Paris en 1846, est une anecdote croustillante, mais inutile ; et le lecteur saisit mal l’intérêt d’une question telle que « Engels a-t-il vraiment abusé de la femme de Moses Hess ? » . Le propos se dilue donc parfois en une juxtaposition d’épisodes sans cohérence réelle. Au chapitre VII, consacré à la période 1869-1883, on voit se succéder une description de l’environnement et du quotidien d’Engels, un rappel (superficiel) de l’attitude des Dioscures pendant la Commune, les débats au sein de l’Internationale, une description de la fortune d’Engels, une analyse de ses angoisses domestiques issues de la rivalité entre ses bonnes, un bilan de son attitude face au socialisme russe, avant de s’achever par la mort de Marx.
590 pages
édition : octobre 2009